6 millions d'euros investis pour restaurer ce monument classé UNESCO

Au large des côtes de la Gironde, un géant de pierre illumine les flots depuis plus de 400 ans. Ce monument historique exceptionnel, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2021, est le plus ancien phare de France encore en activité. Sa construction titanesque au XVIIe siècle, sur un plateau rocheux en pleine mer, représente un exploit architectural sans précédent. Son architecture unique mêlant styles Renaissance et classique en fait un véritable palais des mers, doté d'appartements royaux et d'une chapelle.
Une prouesse architecturale unique : 2500 blocs de pierre assemblés en pleine mer il y a 400 ans
La construction de ce phare monumental débuta en 1584 sous Henri III et s'acheva en 1611 sous Louis XIII. L'édification nécessita pas moins de 2500 blocs de pierre calcaire, minutieusement taillés et transportés par bateau depuis les carrières de la région. Chaque bloc fut assemblé avec une précision remarquable, créant une structure capable de résister aux assauts les plus violents de l'océan Atlantique.
L'architecture du phare se déploie sur plusieurs niveaux, atteignant une hauteur totale de 67,5 mètres. Le soubassement circulaire mesure 41 mètres de diamètre et s'élève à 8 mètres au-dessus des plus hautes mers. Cette base massive assure la stabilité de l'édifice face aux tempêtes. La tour elle-même est constituée de six étages superposés, chacun ayant une fonction spécifique.
Les matériaux utilisés pour la construction témoignent d'un savoir-faire exceptionnel. Les pierres de taille proviennent des carrières de Saint-Même-les-Carrières en Charente, tandis que le mortier hydraulique, capable de durcir sous l'eau, fut spécialement conçu pour résister à l'environnement marin. Les travaux mobilisèrent jusqu'à 300 ouvriers simultanément, travaillant dans des conditions extrêmes dictées par les marées.
Un palais marin unique abritant une chapelle à 20 mètres au-dessus des flots
L'intérieur du phare révèle un aménagement d'une richesse surprenante. Au premier étage se trouve l'appartement du Roi, orné de sculptures et de boiseries somptueuses. Bien que Louis XIV n'y ait jamais séjourné, cette pièce témoigne de la volonté d'affirmer la puissance royale jusqu'au milieu de l'océan. Les murs sont décorés de 12 pilastres corinthiens et de médaillons représentant les grands rois de France.
La chapelle, située au deuxième étage, constitue un élément unique dans l'histoire des phares. Cette chapelle voutée de 6 mètres de hauteur est ornée de sculptures baroques et d'un autel en marbre. Les gardiens y célébraient quotidiennement l'office, maintenant une tradition spirituelle au milieu des flots. Les vitraux d'origine, restaurés au XIXe siècle, filtrent la lumière créant une atmosphère mystique.
Les étages supérieurs abritent les quartiers des gardiens, la salle des machines et enfin la lanterne. Le système d'éclairage actuel, installé en 1823, produit un faisceau lumineux visible à 39 kilomètres. La lentille de Fresnel d'origine, pesant 4 tonnes, est toujours en fonction, tournant sur son bain de mercure comme au premier jour.
400 ans de résistance face aux éléments : un entretien perpétuel
L'entretien du phare représente un défi constant. Chaque année, les maçons spécialisés profitent des grandes marées pour accéder au site et effectuer les réparations nécessaires. Les travaux les plus récents, achevés en 2021, ont nécessité un investissement de 6 millions d'euros pour restaurer la structure et moderniser les installations tout en préservant l'authenticité historique du monument.
Les gardiens du phare ont joué un rôle crucial dans sa préservation. Jusqu'en 2012, ils se relayaient par équipes de deux pour des périodes de 15 jours. Leur quotidien était rythmé par l'entretien des installations, les relevés météorologiques et l'accueil des visiteurs. Aujourd'hui, bien que le phare soit automatisé, des gardiens continuent d'y séjourner régulièrement pour maintenir cette présence humaine historique.