À 180 km de Bordeaux, ce village dévoile 4 siècles d'architecture sur une seule place

400 habitants, 4 siècles d'histoire, et 1 place rectangulaire qui défie le temps. Bienvenue à Monpazier, la bastide médiévale du Périgord qui a traversé les âges sans perdre une once de son charme originel. Fondée en 1284 par le roi d'Angleterre Édouard Ier, cette cité fortifiée aux ruelles parfaitement alignées raconte, à chaque coin de rue, l'épopée d'une France médiévale entre guerres et commerce florissant. Préparez-vous à remonter le temps et à découvrir pourquoi ce village de Dordogne, avec ses arcades séculaires et son marché vieux de 700 ans, continue de fasciner visiteurs et historiens du monde entier.

La naissance d'une bastide royale : quand l'Angleterre façonnait le Périgord

En 1284, alors que la guerre de Cent Ans n'est encore qu'un lointain nuage à l'horizon, le roi Édouard Ier d'Angleterre pose la première pierre de Monpazier. Cette décision n'est pas le fruit du hasard. À l'époque, l'Aquitaine est sous domination anglaise, et le monarque cherche à consolider son emprise sur la région. Monpazier naît ainsi comme une pièce maîtresse sur l'échiquier géopolitique médiéval.

La bastide est conçue selon un plan en damier, caractéristique de l'urbanisme médiéval. Cette organisation rigoureuse, avec ses rues se croisant à angle droit, n'est pas qu'esthétique. Elle répond à des impératifs pratiques : faciliter la défense, organiser le commerce, et asseoir l'autorité royale. Au cœur de ce quadrillage parfait trône la Place des Cornières, véritable poumon économique et social de la cité.

Une place centrale qui défie les siècles : les secrets de la Place des Cornières

La Place des Cornières, joyau architectural de Monpazier, mesure exactement 70 mètres sur 40. Cette précision mathématique n'est pas le fruit du hasard. Chaque détail de sa conception répondait à des normes strictes édictées par l'administration royale anglaise. Les arcades qui l'entourent, appelées "couverts", offraient jadis un abri aux marchands et à leurs étals, créant un espace commercial à l'abri des intempéries.

Aujourd'hui encore, cette place vibre au rythme du marché hebdomadaire, perpétuant une tradition vieille de plus de sept siècles. Chaque jeudi matin, producteurs locaux et artisans y exposent leurs trésors, des fromages de chèvre affinés aux truffes noires du Périgord, en passant par les délicates fraises de Dordogne.

"Notre place, c'est le cœur battant de Monpazier. Chaque pierre raconte une histoire, chaque arcade a vu passer des générations de commerçants et de badauds. C'est un livre d'histoire à ciel ouvert", confie Marguerite Lasserre, historienne locale et guide passionnée.

L'énigme des mesures à grains : un trésor caché sous vos pieds

Au centre de la Place des Cornières se dresse la Halle, un bâtiment du XVIe siècle qui abrite un secret bien gardé. Sous ses voûtes de pierre, le sol recèle d'anciennes mesures à grain, témoins silencieux d'un passé commercial florissant. Ces cavités, creusées dans la pierre, servaient à mesurer avec précision les céréales vendues sur le marché, garantissant ainsi des échanges équitables.

Ces mesures, au nombre de huit, correspondent chacune à une unité de mesure différente. La plus grande, appelée "cartal", équivaut à environ 66 litres, tandis que la plus petite, le "boisseau", ne fait que 12,5 litres. Cette diversité reflète la complexité du système de mesure médiéval, bien loin de notre système métrique actuel.

L'église Saint-Dominique : un bastion de foi au cœur de la cité

Légèrement excentrée par rapport à la place centrale, l'église Saint-Dominique se dresse fièrement depuis le XIIIe siècle. Cette position, typique des bastides, n'est pas un caprice architectural. Elle répond à une logique défensive : en cas de siège, l'église pouvait servir de dernier bastion de résistance sans compromettre le cœur économique de la ville.

L'édifice, mélange de styles roman et gothique, a traversé les siècles non sans cicatrices. Les guerres de Religion ont laissé leur empreinte, obligeant à des restaurations successives. Aujourd'hui, son clocher carré domine toujours la skyline de Monpazier, rappelant aux visiteurs l'importance de la foi dans la vie médiévale.

Vidéo du jour

"L'église Saint-Dominique, c'est plus qu'un lieu de culte. C'est un livre d'histoire à ciel ouvert. Chaque pierre, chaque vitrail raconte un bout de notre passé", explique le père Étienne Dufour, curé de la paroisse.

La Maison du Chapitre : quand les pierres parlent d'Histoire

Adossée à l'église Saint-Dominique, la Maison du Chapitre intrigue par son architecture atypique. Cette bâtisse du XIIIe siècle, avec ses trois étages et ses fenêtres à meneaux, témoigne de l'opulence passée de la ville. Initialement lieu de résidence des chanoines, elle a connu mille vies au fil des siècles.

Après la Révolution française, la Maison du Chapitre fut reconvertie en grange, sauvée de la destruction par son utilité agricole. Aujourd'hui restaurée, elle abrite une boulangerie au rez-de-chaussée, mêlant ainsi passé glorieux et vie quotidienne contemporaine. Les odeurs de pain frais qui s'en échappent chaque matin rappellent que l'histoire de Monpazier continue de s'écrire jour après jour.

Les remparts et portes fortifiées : sentinelles du temps

Bien que largement démolis au fil des siècles, les remparts de Monpazier ont laissé des traces visibles dans le paysage urbain. Des six portes d'origine, trois subsistent encore aujourd'hui : la porte de Campan au nord, la porte Saint-Jacques à l'est, et la porte Notre-Dame au sud. Ces ouvertures, jadis seuls points d'accès à la cité, racontent l'histoire tumultueuse d'une ville constamment sur le qui-vive.

La promenade le long des vestiges des remparts offre une perspective unique sur l'architecture défensive médiévale. Chaque pierre, chaque meurtrière rappelle les périodes troublées de la guerre de Cent Ans, où Monpazier passa plusieurs fois des mains anglaises aux mains françaises.

La gastronomie périgourdine : quand l'histoire se déguste

À Monpazier, l'histoire ne se lit pas seulement dans les pierres, elle se savoure aussi dans l'assiette. La gastronomie locale, riche et variée, puise ses racines dans des siècles de tradition culinaire. Le foie gras, emblème de la région, côtoie sur les tables les truffes noires du Périgord, véritables diamants noirs de la cuisine locale.

Au restaurant "Le Relais de l'Étoile", situé sur la Place des Cornières, le chef Gérard Laumond perpétue ces traditions culinaires avec passion. Son menu change au fil des saisons, mettant à l'honneur les produits locaux : magret de canard aux cèpes en automne, omelette aux truffes en hiver, ou encore fraises du Périgord en été.

"Notre cuisine, c'est l'âme du Périgord dans l'assiette. Chaque plat raconte une histoire, celle de notre terroir et de nos traditions", affirme le chef Laumond avec fierté.

Les festivités : quand le passé s'anime

Monpazier ne se contente pas de préserver son patrimoine, elle le fait vivre. Chaque année, la bastide s'anime au rythme de festivités qui plongent visiteurs et habitants dans l'ambiance médiévale. Le point d'orgue de ces célébrations est sans conteste la Fête Médiévale, qui se tient chaque été depuis plus de 30 ans.

Pendant deux jours, la ville entière remonte le temps. Chevaliers en armure, artisans en costume d'époque, et troubadours investissent les rues. Les visiteurs peuvent assister à des démonstrations de combats médiévaux, participer à des ateliers de calligraphie, ou encore déguster des mets préparés selon des recettes ancestrales.

L'artisanat local : les gardiens du savoir-faire

Dans les ruelles de Monpazier, l'artisanat traditionnel n'est pas une relique du passé, mais une réalité bien vivante. Potiers, ébénistes, et ferronniers perpétuent des techniques ancestrales, adaptées aux goûts contemporains. Leurs ateliers, souvent installés dans des bâtisses séculaires, sont autant de fenêtres ouvertes sur un savoir-faire précieux.

L'atelier de Jean-Louis Auricombe, maître verrier, est un incontournable. Installé dans une maison à colombages du XVe siècle, il crée des vitraux d'une beauté saisissante, mêlant techniques traditionnelles et designs modernes. Ses œuvres ornent non seulement les édifices religieux de la région, mais aussi des demeures privées du monde entier.

Hébergements : dormez dans l'Histoire

Pour une immersion totale dans l'atmosphère médiévale de Monpazier, rien ne vaut une nuit dans l'une des demeures historiques de la ville. L'hôtel Edward 1er, niché dans une bâtisse du XIIIe siècle, offre un confort moderne dans un cadre authentique. Ses chambres aux poutres apparentes et aux murs de pierre vous transporteront instantanément plusieurs siècles en arrière.

Pour ceux qui préfèrent une expérience plus intime, les chambres d'hôtes "Au Cœur de la Bastide" proposent un séjour dans une maison à colombages du XVe siècle. La propriétaire, Marguerite Deschamps, passionnée d'histoire locale, se fera un plaisir de partager avec vous les secrets et anecdotes de Monpazier autour d'un petit-déjeuner composé de produits locaux.

Monpazier, un voyage dans le temps à portée de main ?

Monpazier n'est pas un simple vestige du passé figé dans le temps. C'est une ville vivante, où l'histoire continue de s'écrire jour après jour. Chaque pierre, chaque ruelle, chaque habitant raconte une histoire qui s'étire sur plus de sept siècles. Visiter Monpazier, c'est faire un voyage dans le temps tout en gardant un pied dans le présent.

Que vous soyez passionné d'histoire, amateur de gastronomie, ou simplement en quête d'authenticité, Monpazier a quelque chose à vous offrir. Cette bastide médiévale, avec son plan parfait et ses traditions bien vivantes, est bien plus qu'une simple destination touristique. C'est une expérience immersive, une plongée dans un passé qui continue de façonner notre présent. Alors, êtes-vous prêt à remonter le temps et à découvrir les secrets de Monpazier ?