Les Britanniques prêts à payer plus pour une mode durable, une étude le prouve
La fast fashion, ce modèle fondé sur le renouvellement ultrarapide des collections à petits prix, fait l'objet de critiques croissantes pour son impact environnemental et social. Pourtant, le Royaume-Uni reste l'un des plus gros consommateurs de fast fashion en Europe. Mais les mentalités évoluent, et de plus en plus de Britanniques se disent prêts à adopter une mode plus responsable. C'est ce que révèle une étude originale menée auprès de consommateurs outre-Manche, en s'appuyant sur le modèle "ABC" (Affectif, Comportemental, Cognitif) des composantes de l'attitude. Au-delà des bonnes intentions, les chercheurs mettent en lumière les freins et les leviers à l'achat de mode durable, liés à des facteurs économiques, psychologiques et culturels.
Un modèle théorique pour cerner l'attitude des consommateurs
Pour comprendre ce qui motive ou freine l'achat de produits durables dans la fast fashion, les auteurs ont passé en revue différentes théories issues de l'économie, de la psychologie, de l'anthropologie et du marketing. Ils en tirent un cadre conceptuel identifiant trois composantes de l'attitude du consommateur :
- La composante cognitive, qui renvoie aux connaissances et aux croyances sur la durabilité
- La composante affective, qui concerne les sentiments et les émotions suscités par la mode durable
- La composante comportementale, qui se rapporte aux décisions et aux actes d'achat
Différents facteurs sont susceptibles d'influencer chacune de ces composantes, comme le prix, le revenu, l'âge, le genre, la culture, la religion, etc. Sur la base de ce modèle "ABC", un questionnaire en ligne a été soumis à un échantillon de 128 jeunes consommateurs britanniques de fast fashion pour cerner leur attitude envers la durabilité.
Mode durable : les jeunes Britanniques en ont conscience, mais à quel prix ?
Les résultats montrent que la prise de conscience des enjeux de durabilité progresse, mais de façon différenciée. Les femmes sont plus sensibles au travail des enfants et à l'environnement, les hommes aux inégalités. Cette sensibilité s'accroît avec l'âge et la situation professionnelle.
Mais cette prise de conscience ne se traduit pas automatiquement en achats responsables. Si les Britanniques se disent en majorité favorables à la mode durable, peu sont prêts à y mettre le prix. Un produit "vert" ne doit pas coûter plus de 10 à 20% plus cher pour la plupart. Les femmes sont moins sensibles au prix que les hommes, mais plus au niveau de revenu nécessaire pour franchir le pas.
Le rôle clé de la culture et de la religion
Surtout, les facteurs culturels et religieux s'avèrent cruciaux pour expliquer les différences d'attitude. Ainsi, les Européens sont plus préoccupés par l'environnement, les Américains plus sceptiques envers les marques durables, les Africains plus sensibles au travail des enfants. Les Musulmans accordent moins d'importance à la durabilité que les autres confessions. Les Bouddhistes mettent l'accent sur les enjeux sociaux plus qu'environnementaux.
Un facteur méconnu : les "fashion victims" les moins écolos
L'étude met en lumière un résultat contre-intuitif : ce sont les plus gros consommateurs de fast fashion, ceux qui y consacrent une part importante de leur budget, qui ont le moins conscience des enjeux de durabilité. Un effet pervers possible de la "démocratisation de la mode" portée par la fast fashion, qui encourage une consommation débridée au détriment de l'attention à l'impact social et environnemental.
Connaissances durables et comportements responsables : un lien à renforcer
Autre enseignement important : il peut y avoir un décalage entre les connaissances affichées sur la mode durable et les connaissances réelles. Par exemple, seule une minorité des sondés a su identifier la fibre la plus écologique parmi plusieurs propositions. Ce manque de connaissance concrète des alternatives durables peut expliquer le hiatus entre prise de conscience et passage à l'acte. Informer et éduquer les consommateurs sur les "bons gestes" s'avère donc essentiel.
Promouvoir la mode durable : des leviers à activer
Au final, cette étude offre des clés pour comprendre le rapport ambivalent des jeunes Britanniques à la mode durable, entre aspirations éthiques et réalités économiques. Pour les marques, c'est l'occasion de mieux cerner leurs cibles et d'adapter leurs offres et leur communication. Un juste équilibre à trouver entre accessibilité prix et valeur ajoutée responsable pour convaincre le chaland.
Quant aux pouvoirs publics, ils peuvent s'appuyer sur ces résultats pour mettre en place des incitations fiscales (comme des taxes ou des subventions) et des campagnes de sensibilisation adaptées aux différents profils culturels. L'enjeu : accélérer la transition vers une mode plus durable en faisant évoluer les mentalités et les comportements.
FAQ
Quelle est la part des achats durables dans la fast fashion au Royaume-Uni ?
L'étude montre que pour la plupart des jeunes Britanniques interrogés, moins de 20% de leurs achats de fast fashion intègrent des critères de durabilité. Les produits "responsables" restent minoritaires dans leurs garde-robes.
Les Britanniques sont-ils prêts à payer plus cher pour une mode plus durable ?
Une majorité se dit prête à payer jusqu'à 10-20% plus cher pour des produits de fast fashion plus durables. Mais cette propension varie fortement selon le genre, le budget mode, le niveau de revenu. Les femmes sont moins sensibles au prix que les hommes.
Quels sont les principaux freins à l'achat de mode durable pour les jeunes Britanniques ?
Outre le prix, le manque de connaissances concrètes sur les alternatives durables et le poids des habitudes de consommation ressortent comme des freins majeurs. La sensibilité à la mode éthique varie aussi fortement selon les origines culturelles et religieuses.
Comment encourager une mode plus responsable au Royaume-Uni ?
L'étude suggère de jouer sur plusieurs leviers : rendre l'offre durable plus accessible et attractive, mieux informer sur les "bons choix", et utiliser des incitations économiques ciblées (taxes, subventions...). Un effort pédagogique adapté aux différences culturelles est aussi nécessaire. Les marques, les pouvoirs publics et les consommateurs ont tous un rôle à jouer.