Coenzyme Q10 : peut-il vraiment vous aider à éliminer la graisse ?
Le coenzyme Q10 (CoQ10), également connu sous le nom d'ubiquinone, est une molécule naturellement présente dans toutes les cellules de notre organisme.
Cet antioxydant joue un rôle crucial dans la production d'énergie mitochondriale et est essentiel au bon fonctionnement de nombreux organes.
Disponible sous forme de complément alimentaire, le CoQ10 est souvent vanté pour ses multiples bienfaits santé, allant de la protection cardiovasculaire à l'amélioration des performances sportives. Certains lui prêtent même des vertus amincissantes, suggérant qu'il pourrait favoriser la perte de poids. Mais qu'en dit la science ? Une récente méta-analyse d'essais contrôlés apporte des éléments de réponse.
Le CoQ10 : un acteur clé du métabolisme énergétique
Avant de s'intéresser à son effet potentiel sur le poids, il est important de comprendre le rôle physiologique du coenzyme Q10. Cette molécule est en effet un maillon essentiel de la chaîne respiratoire mitochondriale, le processus par lequel nos cellules produisent de l'énergie à partir des nutriments.
Le CoQ10 agit comme un transporteur d'électrons entre les différents complexes enzymatiques, permettant la synthèse d'ATP (adénosine triphosphate), la "monnaie énergétique" de nos cellules.
Outre cette fonction centrale dans le métabolisme, le coenzyme Q10 est également un puissant antioxydant. Il protège les membranes cellulaires et les lipoprotéines de l'oxydation, contribuant ainsi à prévenir de nombreux dommages tissulaires.
Des études ont montré que le CoQ10 pouvait améliorer la fonction endothéliale, réduire le stress oxydatif et l'inflammation, abaisser la pression artérielle et augmenter la capacité antioxydante totale de l'organisme. Des bénéfices qui expliquent l'intérêt du CoQ10 dans la prévention des maladies cardiovasculaires et neurodégénératives.
Un rationnel scientifique en faveur d'un effet "brûle-graisse" du CoQ10
Si le coenzyme Q10 est surtout connu pour ses propriétés cardioprotectrices et antioxydantes, certains arguments laissent penser qu'il pourrait aussi favoriser la perte de poids.
Des études sur des modèles animaux ont en effet montré que le CoQ10 stimule l'oxydation des acides gras, inhibe la différenciation des préadipocytes (les cellules précurseurs des adipocytes matures) et réduit l'accumulation de graisse dans le tissu adipeux.
Ces effets passeraient notamment par l'activation de l'AMPK (protéine kinase activée par l'AMP), un enzyme clé de la régulation du métabolisme énergétique.
En stimulant l'AMPK, le CoQ10 favoriserait l'utilisation des lipides comme substrat énergétique et inhiberait la lipogenèse (synthèse des graisses). Un mécanisme séduisant sur le papier, mais qu'en est-il réellement chez l'humain ?
La méta-analyse qui remet en question l'intérêt du CoQ10 pour mincir
Pour répondre à cette question, des chercheurs ont réalisé une revue systématique et méta-analyse des essais contrôlés randomisés ayant évalué l'effet de la supplémentation en CoQ10 sur des paramètres anthropométriques tels que le poids, l'indice de masse corporelle (IMC) et le tour de taille. Publiée en 2020 dans l'International Journal of Preventive Medicine, cette méta-analyse a inclus 20 études totalisant 976 participants adultes.
Les doses de CoQ10 administrées allaient de 100 à 300 mg par jour, pour des durées d'intervention comprises entre 4 et 24 semaines. Les changements de poids, d'IMC et de tour de taille ont été comparés entre les groupes supplémentés et les groupes placebo.
Résultat : la méta-analyse n'a mis en évidence aucun effet significatif du CoQ10 sur les trois paramètres étudiés. Comparativement au placebo, la supplémentation en CoQ10 n'a entraîné qu'une différence moyenne de poids de -0,04 kg (IC à 95% : -1,96 à 1,60 kg), de -0,06 kg/m² pour l'IMC (IC à 95% : -0,54 à 0,42 kg/m²) et de -0,79 cm pour le tour de taille (IC à 95% : -2,83 à 0,04 cm). Des analyses en sous-groupes selon la dose de CoQ10 ou la durée d'intervention n'ont pas non plus permis de déceler un quelconque bénéfice sur ces paramètres.
Des résultats à interpréter avec prudence
Faut-il pour autant en conclure que le CoQ10 est totalement dénué d'intérêt pour la gestion du poids ? Certaines limites de cette méta-analyse incitent à nuancer les résultats.
Premièrement, les études incluses portaient sur des populations hétérogènes, allant de sujets en bonne santé à des patients atteints de diverses pathologies chroniques (diabète, syndrome métabolique, stéatose hépatique non alcoolique...). Or, il est possible que l'effet du CoQ10 diffère selon le contexte clinique.
De plus, la plupart des études n'avaient pas pour objectif principal d'évaluer l'impact du CoQ10 sur la composition corporelle. Les données anthropométriques étaient souvent rapportées comme des critères secondaires, ce qui limite la puissance statistique pour détecter un effet. Enfin, les doses et durées d'intervention variaient considérablement d'une étude à l'autre, rendant les comparaisons difficiles.
Malgré ces réserves, cette méta-analyse apporte des preuves solides que la supplémentation en CoQ10, aux doses usuelles et sur des périodes de quelques mois, n'a pas d'effet notable sur le poids ou la répartition de la graisse corporelle. Il est possible que son action sur le métabolisme lipidique soit trop modeste pour induire une perte pondérale significative, ou qu'elle soit contrebalancée par d'autres facteurs.
Miser sur les fondamentaux plutôt que sur les compléments
S'il ne semble pas être un acteur majeur de la perte de poids, le coenzyme Q10 n'en reste pas moins un nutriment essentiel au bon fonctionnement de l'organisme. Une supplémentation peut s'avérer bénéfique en cas de carence ou dans certaines indications cliniques bien précises (insuffisance cardiaque, migraines, maladies neurodégénératives...).
Mais il serait illusoire d'en attendre des miracles pour affiner sa silhouette !
Pour perdre du poids durablement, mieux vaut miser sur les piliers d'un mode de vie sain et équilibré. Un déficit calorique modéré, associant une alimentation de qualité et la pratique régulière d'une activité physique, reste la stratégie la plus efficace et la plus pérenne. Certains nutriments comme les protéines, les fibres ou les acides gras oméga-3 peuvent aider à optimiser la perte de graisse et le maintien de la masse musculaire, mais aucun complément "brûle-graisse" ne se substitue aux fondamentaux !
En conclusion, malgré son rôle physiologique incontestable, le coenzyme Q10 ne semble pas être un levier significatif pour mincir ou lutter contre l'obésité. Si vous souhaitez en prendre pour bénéficier de ses autres propriétés (antioxydantes, anti-inflammatoires, cardioprotectrices...), faites-le en connaissance de cause, sans en attendre de bénéfice notable sur votre poids.
Et rappelez-vous que le meilleur "remède" contre les kilos superflus reste encore l'adoption durable de saines habitudes de vie ! Les compléments alimentaires, aussi séduisants soient-ils, ne remplaceront jamais une alimentation équilibrée et une activité physique régulière.