Selon les biologistes, ce lac français est une capsule temporelle de l'ère glaciaire

À 2 220 mètres au-dessus du niveau de la mer, un joyau azuré se dévoile aux randonneurs persistants. Ses eaux cristallines reflètent les sommets environnants, créant un tableau naturel d'une beauté saisissante. Mais ce qui rend ce lieu véritablement exceptionnel n'est pas seulement son statut de plus grand lac naturel d'altitude d'Europe, c'est aussi la présence improbable d'une espèce de poisson venue tout droit des régions arctiques, ayant trouvé refuge dans ces eaux froides des Alpes françaises.
Un écrin d'eau entre ciel et terre
Le Lac d'Allos, situé dans le Parc National du Mercantour dans les Alpes-de-Haute-Provence, impressionne par sa superficie de 54 hectares et sa profondeur pouvant atteindre 42 mètres. Entouré d'un cirque montagneux spectaculaire dominé par le Mont Pelat culminant à 3 051 mètres, ce lac offre un panorama à couper le souffle.
L'écosystème unique qui s'est développé autour du lac témoigne d'un environnement préservé, où la flore alpine se déploie dans toute sa diversité. Les prairies d'altitude qui bordent ses rives s'habillent, selon les saisons, de gentianes, d'edelweiss et autres fleurs alpines, formant un écrin naturel préservé.
Alimenté par la fonte des neiges et plusieurs torrents, le lac se pare parfois d'un bleu profond, parfois d'un turquoise éclatant, variant ses teintes au gré des conditions météorologiques et de l'inclinaison du soleil. Ce phénomène lui confère une aura presque mystique, renforcée par le silence qui règne dans ces hauteurs.
L'omble chevalier, un survivant de l'ère glaciaire
L'histoire fascinante du lac d'Allos ne serait pas complète sans évoquer son habitant le plus emblématique : l'omble chevalier. Ce salmonidé d'origine arctique représente un véritable mystère pour les biologistes et un témoignage vivant des grandes glaciations.
Cousin du saumon, ce poisson aux reflets argentés s'est adapté aux conditions extrêmes des lacs d'altitude, où les températures peuvent descendre bien en dessous de zéro. Sa présence dans ces eaux est le résultat d'une migration forcée lors du retrait des glaciers, il y a plusieurs milliers d'années, faisant de lui un vestige vivant de l'âge glaciaire.
Espèce protégée, l'omble chevalier constitue aujourd'hui un indicateur précieux de la qualité des eaux du lac. Sa survie témoigne de l'équilibre fragile de cet écosystème d'altitude, particulièrement sensible aux variations climatiques et aux activités humaines.
Une expérience alpine authentique
Accessible uniquement à pied après une randonnée de près de deux heures depuis le hameau du Laus ou trois heures depuis Val d'Allos, le lac récompense les marcheurs par son authenticité préservée. Cette relative difficulté d'accès a permis de conserver l'intégrité écologique du site, en limitant naturellement la fréquentation.
L'été offre une fenêtre idéale pour découvrir ce joyau lacustre, lorsque les sentiers sont dégagés et que la flore alpine explose en mille couleurs. Les plus audacieux pourront même se rafraîchir dans ses eaux cristallines mais froides, généralement entre 10 et 15°C au plus fort de l'été, rappelant les températures que l'on trouve dans certains environnements alpins extrêmes.
En hiver, le lac se métamorphose sous une épaisse couche de glace, créant un paysage féerique mais accessible uniquement aux alpinistes expérimentés. Cette double identité saisonnière ajoute encore au caractère exceptionnel du lieu, qui semble osciller entre deux mondes.
Dans ce sanctuaire naturel où le temps semble suspendu, le lac d'Allos offre bien plus qu'un simple panorama : c'est une véritable plongée dans l'histoire géologique des Alpes et un témoignage précieux de la capacité d'adaptation de la vie aux conditions les plus extrêmes.