Voltaire, Montesquieu, Rousseau : ils ont tous été les hôtes de ce château

Le Château de Chenonceau, véritable pont sur le Cher, est indissociable de deux femmes qui ont marqué son histoire : Catherine de Médicis et Diane de Poitiers. Ces deux rivales, qui se sont disputé le cœur du roi Henri II, ont chacune laissé leur empreinte sur ce joyau de la Renaissance. Entre intrigues politiques et passions amoureuses, Chenonceau garde les secrets de ces deux femmes de pouvoir qui ont façonné son destin.

Diane de Poitiers, la favorite royale qui fit de Chenonceau un écrin de beauté

Diane de Poitiers, maîtresse du roi Henri II, reçut le Château de Chenonceau en cadeau de son royal amant en 1547. Cette femme de goût et d'esprit entreprit aussitôt de transformer le château pour en faire un lieu à son image : raffiné, élégant et empreint de symbolisme. C'est à elle que l'on doit les célèbres jardins de Chenonceau, organisés selon un plan géométrique rigoureux. Les 130 000 plantations annuelles qui ornent aujourd'hui ces jardins perpétuent l'héritage de Diane.

Un des ajouts les plus remarquables de Diane fut le pont qui enjambe le Cher. Long de 60 mètres, ce pont, unique en son genre, confère au château sa silhouette si particulière. Diane y fit aménager une galerie, véritable prouesse architecturale pour l'époque, qui servait de lieu de promenade et de réception. Les bals donnés dans cette galerie, éclairée par 18 fenêtres, étaient réputés dans toute la France.

Diane de Poitiers marqua également Chenonceau de son chiffre. Partout dans le château, on retrouve ses initiales entrelacées avec celles du roi, ainsi que son emblème, trois croissants de lune. Cette omniprésence des symboles de Diane était une manière d'affirmer son statut et son pouvoir, au grand dam de la reine légitime, Catherine de Médicis.

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Catherine de Médicis, la reine mère qui fit de Chenonceau le siège de son gouvernement

À la mort d'Henri II en 1559, Catherine de Médicis, son épouse délaissée, prit sa revanche. Elle obligea Diane de Poitiers à lui céder Chenonceau en échange du château de Chaumont. La reine mère, désormais régente du royaume, fit de Chenonceau sa résidence principale et le siège de son gouvernement.

Catherine apporta à son tour ses modifications au château. Elle fit construire sur le pont la galerie qui porte aujourd'hui son nom, prolongeant ainsi l'œuvre de sa rivale. Cette galerie de 60 mètres, véritable salon suspendu au-dessus de l'eau, servait de salle de bal et de réception. C'est là que Catherine organisait les somptueuses fêtes qui firent la renommée de la cour de France.

Mais Catherine de Médicis fit aussi de Chenonceau un lieu de pouvoir. C'est dans le cabinet vert, sa pièce favorite, qu'elle tenait son conseil et recevait les ambassadeurs. Depuis cette pièce de 15 m², avec vue sur le Cher, Catherine régna sur la France pendant près de 30 ans. On raconte que c'est à Chenonceau qu'elle aurait planifié le massacre de la Saint-Barthélemy en 1572.

Catherine apporta également un soin particulier à la décoration intérieure du château. Elle fit venir d'Italie des artistes de renom pour réaliser les fresques et les sculptures qui ornent les salles. Le grand escalier, chef-d'œuvre de l'art Renaissance, fut construit sur son ordre. Avec ses voûtes ornées de caissons sculptés et ses marches en pierre de taille, il témoigne du goût et de la magnificence de la reine mère.

Un château qui a traversé les siècles, témoin de l'histoire de France

Après la mort de Catherine de Médicis en 1589, Chenonceau connut une histoire mouvementée. Propriété de la couronne, il fut donné en cadeau, vendu, racheté, au gré des soubresauts de l'histoire. Au 18e siècle, Madame Dupin, femme de lettres et figure des Lumières, y tint un salon littéraire réputé. Voltaire, Montesquieu et Rousseau furent ses hôtes.

Pendant la Révolution française, Chenonceau fut miraculeusement épargné. Transformé en hôpital militaire pendant la Première Guerre mondiale, il accueillit plus de 2000 soldats blessés. Pendant la Seconde Guerre mondiale, sa galerie sur le Cher servit de passage entre la zone libre et la zone occupée, permettant à de nombreuses personnes d'échapper aux nazis.

Aujourd'hui, le Château de Chenonceau est le deuxième château le plus visité de France après Versailles. Chaque année, près d'un million de visiteurs viennent découvrir ce lieu chargé d'histoire, qui a vu se croiser les destins de deux femmes d'exception. De Diane de Poitiers à Catherine de Médicis, Chenonceau garde la mémoire de ces dames de cœur et de pouvoir qui ont façonné son histoire et sa légende.