Ce château français a hébergé pendant 13 ans le dernier roi catholique d'Angleterre

Le château de Saint-Germain-en-Laye représente un chapitre majeur de l'histoire de France et d'Angleterre à travers l'exil du roi Jacques II Stuart. Cette résidence royale, construite au 12e siècle et transformée au fil des siècles, a accueilli pendant 13 ans le dernier roi catholique d'Angleterre après sa destitution en 1688. C'est dans ce château que Louis XIV, protecteur et cousin de Jacques II, lui offrit l'asile et les moyens de maintenir une cour en exil, transformant ainsi Saint-Germain-en-Laye en un véritable centre de la résistance jacobite.

Une forteresse médiévale de 7000m² transformée en palais royal par 7 rois de France successifs

Le château de Saint-Germain-en-Laye se dresse sur un plateau dominant la Seine, à 19 kilomètres de Paris. Sa construction initiale remonte à Louis VI le Gros en 1124. L'édifice actuel, fruit de multiples transformations, conserve son plan pentagonal caractéristique avec ses cinq tours d'angle. François Ier entreprit sa reconstruction en 1539, faisant appel aux plus grands architectes de la Renaissance pour créer un palais digne des plus grandes cours européennes. Les travaux s'étalèrent sur près de 20 ans, donnant naissance à une architecture unique mêlant style médiéval et Renaissance française.

Le château connut son apogée sous Louis XIV, qui y naquit en 1638. Le Roi Soleil y passa une grande partie de sa jeunesse et y effectua d'importants travaux d'embellissement. Les appartements royaux furent entièrement réaménagés, les jardins redessinés par Le Nôtre sur plus de 3800 hectares. La terrasse de Le Nôtre, longue de 2,4 kilomètres, offrait une vue imprenable sur la vallée de la Seine et Paris, devenant l'une des promenades favorites de la cour.

En 1682, Louis XIV quitta Saint-Germain pour Versailles, mais le château ne fut pas abandonné pour autant. Il devint la résidence principale de Jacques II Stuart et de sa cour en exil, composée de plus de 40 nobles et leurs familles. Le roi déchu disposait d'une pension annuelle de 600 000 livres, soit l'équivalent de plusieurs millions d'euros actuels, pour maintenir son train de vie royal.

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13 années d'exil doré : la cour jacobite de Jacques II transforme le château en centre de résistance

Jacques II Stuart arriva à Saint-Germain-en-Laye le 7 janvier 1689, accompagné de sa seconde épouse Marie de Modène et de leur fils, le Prince de Galles. Louis XIV mit à leur disposition l'intégralité du château, soit plus de 100 pièces réparties sur quatre niveaux. La cour jacobite en exil comptait près de 200 personnes, dont 50 gardes du corps, maintenant ainsi le protocole d'une véritable cour royale.

Le château devint rapidement le centre névralgique du mouvement jacobite. Des émissaires secrets partaient régulièrement vers l'Angleterre, l'Écosse et l'Irlande pour organiser la résistance. Les archives révèlent que plus de 1000 lettres codées furent échangées entre Saint-Germain et les partisans de Jacques II entre 1689 et 1701. Le roi en exil y reçut également de nombreux visiteurs illustres, dont le philosophe John Locke et l'écrivain Jonathan Swift.

La vie quotidienne à Saint-Germain était rythmée par un cérémonial strict. Jacques II passait plusieurs heures par jour dans la chapelle royale, assistant à trois messes quotidiennes. Il consacrait également beaucoup de temps à la chasse dans la forêt environnante, qui s'étendait alors sur plus de 5500 hectares. La reine Marie de Modène, quant à elle, organisait régulièrement des concerts et des bals dans la grande galerie du château, longue de 45 mètres.

Un site historique qui conserve 450 ans de mémoire royale française et britannique

Aujourd'hui, le château abrite le Musée d'Archéologie Nationale, créé par Napoléon III en 1862. Les appartements de Jacques II ont été préservés et restaurés, permettant aux visiteurs de découvrir le cadre de vie du roi en exil. La chambre royale, avec son plafond à caissons d'origine et ses boiseries du XVIIe siècle, témoigne du luxe dans lequel vivait la cour jacobite.

Le château conserve également de nombreux objets ayant appartenu à Jacques II, dont son masque mortuaire, réalisé après sa mort le 16 septembre 1701. La chapelle royale, où il passait de longues heures en prière, abrite toujours le prie-Dieu qu'il utilisait quotidiennement. Les jardins, bien que modifiés au fil des siècles, permettent encore d'admirer la célèbre terrasse de Le Nôtre, qui offre l'un des plus beaux panoramas d'Île-de-France.